Biodiversité citoyenne à Claveau, suite
Vendredi 15 décembre 2023, l’association Tous aux abris a animé un atelier de montage de nichoirs pour rouges-gorges à la Cité Claveau, dans le quartier de Bacalan, au nord de Bordeaux.
Cet atelier s’inscrit dans notre projet « Biodiversité citoyenne à Claveau », lauréat du prix des jeunes associations de la Ville de Bordeaux en 2021 et facilité par Aquitanis. Lequel projet vise à impliquer les habitants dans le montage et l’installation d’abris et nichoirs pour la faune sauvage présente dans le quartier, et inclut une signalétique informative et pédagogique à l’attention du public.
Le contexte
Depuis 2021, près d’une trentaine d’ateliers animés par les bénévoles de Tous aux abris ont eu lieu sur divers sites de Claveau. Les occasions étaient jusque-là liées à des événements saisonniers, comme la Fête du printemps, et/ou à des opportunités de partenariats avec d’autres associations (Unis-Cité, Place aux Jardins…).
La création récente du Kiosque de Claveau, bibliothèque de rue face à l’école maternelle Point du jour, a permis d’ouvrir nos ateliers sur un lieu stratégique, car fréquenté au quotidien par les élèves et leurs parents. La différence est nette : au lieu d’inciter le public à venir sur un espace temporaire, événementiel, nous allons le solliciter là où il se trouve !
Malgré une communication tardive de la part de notre association sur cet atelier, malgré l’hiver qui incite chacun à rentrer au plus vite chez soi, nous avons bénéficié de deux atouts : le relais de la part des écoles (Anne-Sylvestre et Point du Jour), et la présence active d’une bénévole, elle-même parente d’élèves dans ces écoles ! La médiation est LE point crucial qui permet à une association de rencontrer son public, et c’est ce qui passé ce vendredi 15 décembre à Claveau.
La magie de Noël
Après avoir hésité entre 3 ou 4 abris à faire monter par les téméraires qui braveraient le froid et la fatigue du vendredi soir, ce sont au final 8 kits complets que nous avons poncés et amenés à tout hasard au Kiosque. Heureusement ! car il y a eu entre 20 et 25 personnes qui se sont impliquées (rappelons qu’un atelier mobilise en moyenne 8 à 12 participants). Un afflux inespéré ! Les petits, aidés des grands, se sont emparés des 8 visseuses avec le plaisir et l’envie de fabriquer de leurs mains.
Ces nichoirs ont pour objectif d’être installés dans l’espace public de Claveau, et des panneaux informatifs les accompagneront. Les enfants acceptent tout à fait de ne pas repartir avec, et leurs parents et eux demandent à être informés des suites de leur action. Notre projet prend ici un tournant, car ce public n’est pas le même qu’auparavant sur les autres sites de Claveau, composé majoritairement de retraités et d’habitués.
Ceci amène plusieurs réflexions :
La biodiversité est l’affaire de tous ! C’est le premier constat du succès de cet atelier. Si, malgré sa faible communication, il a tout de même rencontré son public, c’est aussi parce qu’il correspond à une attente. Attente individuelle car, même en situation de précarité, quand on a l’opportunité de ne plus être sujet (bénéficiaire d’aides diverses), pour devenir soi-même acteur de son environnement, on y regagne en dignité. Et c’est par le bricolage que chacun peut passer à ce mode actif, avoir prise sur son écosystème immédiat et transmettre à son tour l’envie et le geste. (Glissons au passage que les kits « nichoirs à rouges-gorges », fabriqués dans notre atelier en bois local non traité, et composés de 7 pièces, ne sont pas évidents à monter.) Attente collective, car agir pour le vivant, lors d’un atelier participatif, permet de fédérer de manière positive toutes les catégories sociales et toutes les générations. Malheureusement, le social et la biodiversité sont deux budgets différents dans les politiques publiques, et les associations qui cherchent à réunir les deux semblent ne pouvoir obtenir de subvention ni de l’un ni de l’autre.
Or il s’agit bien de « vivre ensemble », de « territoire », que l’attention au vivant interroge. Quel est le territoire d’un hérisson, lui qui doit parcourir plusieurs kilomètres par nuit l’été, en traversant de nombreux jardins, quel est – quels sont – les territoires d’un oiseau, variables selon ses besoins, les ressources, les saisons ? Comment « faire place » à nos voisins sauvages est-il compatible avec notre souci de « faire propre » ? Qui doit décider de ces questions, quels services sont concernés ? Comment abris et nichoirs peuvent-ils être actuellement de l’ordre d’un marché public de « petit matériel » pour les parcs et jardins, soumis à la concurrence et avec contrat d’exclusivité pour le « fournisseur » retenu ? Doit-on continuer à professionnaliser et privatiser les questions liées à la biodiversité, malgré l’effondrement généralisé de celle-ci ? Au final, qui est le « client », quel est le « marché » ? Les enfants des écoles de Claveau ont pourtant bien compris, eux, que ces nichoirs ne leur appartenaient pas, qu’ils les avaient fabriqués pour les rouges-gorges, et ils en étaient heureux.
Nous continuons à penser qu’abris et nichoirs sont des supports indispensables pour recréer de la cohésion sociale, pour faire de la pédagogie active, du jeu, de l’action collective et positive sur des enjeux qui dépassent une logique de marché héritée du siècle dernier, pour -enfin- construire du commun autour du vivant. Car un nichoir, ce n’est pas du matériel installé dans un paysage, c’est un lieu de vie installé dans un autre lieu de vie. En espérant pouvoir compter également sur d’autres aides (une demande de subvention déposée début juillet n’a pas encore reçu de réponse), nous remercions Aquitanis pour son soutien renouvelé en 2023, sous forme de convention partenariale. Merci également à Barbara, récente bénévole pour Tous aux abris, à Marion pour ce Kiosque, aux écoles, aux enfants et à leurs parents pour leur implication – de la part des rouges-gorges !
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